Fatah al-Islam : Du clan Hariri à Michel Sleimane

Publié le par newsleb-mania

Par Nayla El Eid - Twitter : @naylaeleid


Les liens qui unissent le clan Hariri et le Fatah al-Islam ont été évoqués à plusieurs reprises, notamment lors des affrontements qui ont éclaté à Nahr el-Bared en mai 2007, entre l’armée libanaise et le groupuscule terroriste. Toutefois aujourd’hui et, au regard de la situation à la frontière libano-syrienne, ce sujet est une nouvelle fois au cœur de l’actualité. D’autant plus que la disparition de Chaker el-Absi et l’accession au pouvoir de Michel Sleimane qui en a découlée, sont deux zones d’ombres qui méritent un éclairage.


L’ascension politique de Michel Sleimane 


En septembre 2007, l’armée libanaise alors dirigée par le général Michel Sleimane, vient à bout du Fatah al-Islam. Mais son chef Chaker el-Absi, réussi étrangement à passer entre les mailles du filet de l’armée, michel-sleimanedans un camp totalement rasé par les combats. Ce fait n’a pas l’air d’inquiéter les responsables de l’époque, qui préfèrent louer l’acte héroïque du commandant en chef.


Un an plus tard, ce même commandant en chef de l’armée libanaise, estimé de tous (ou presque) après sa victoire contre le Fatah al-Islam, est élu à la tête de l’Etat libanais. Pour le sociologue de l’université américaine de Beyrouth Sari Hanafi, « la bataille de Nahr el-Bared a représenté un moment majeur dans l’ascension politique du chef de l’armée, le général Michel Sleimane, vers la présidence de la République ». « La victoire de Nahr el-Bared a contribué à construire sa légitimité de soldat au service d’un Liban uni contre l’ennemi palestinien de l’intérieur », précise-t-il en 2008, dans son article publié dans la revue Asylon.


En effet, le Liban n’était pas si uni, le 7 mai 2008. Les affrontements ont même démontré que la coexistence au pays du Cèdre est avant tout fragile. Et ce n’est qu’après des négociations intenses à Doha, qu’un accord a été signé entre les différents responsables politiques, en vue de mettre fin aux violences meurtrières. Il ne restait plus alors qu’à élire un président de la République, dont le siège était resté vacant depuis près d’un an. A ce moment, les regards s’étaient tournés vers les candidats potentiellement éligibles à ce poste : Michel Aoun, Boutros Harb, Nassib Lahoud, Robert Ghanem, Joseph Tarabay et Damianos Kattar, mais le nom de Michel Sleimane ne figurait pas encore sur cette liste.


Cette proposition de candidats n’a donc fait qu’envenimer la crise politique, les responsables n’arrivant pas à se mettre d’accord sur l’un de ces personnages, trop peu « consensuels » à leur goût. Mais en janvier 2008, le philosophe Antoine-Joseph Assaf apporte un élément de solution. Dans une entrevue accordée au quotidien France-Soir, il indique que « si la majorité et l’opposition n’arrivent pas à s’entendre, ni à élire un président à l’intérieur du parlement, il faudra recourir à la solution la plus sûre qui ferait du chef d’état-major des armées, le général Soleiman, le candidat du salut. A son actif ; il a la récente victoire dans le Nord contre les terroristes du Fath El Islam ».


Un accord qui a coûté la vie à François el-Hajj


Le général Sleimane n’a, en fait à son actif, que la victoire contre le Fatah al-Islam. Ce qui a paradoxalement suffit à le faire élire à la tête de l’Etat. De ce fait, la disparition de Chaker el-Absi ne paraît plus si étrange que cela, mais plutôt comme un accord conclu entre le groupuscule et le gouvernement de l’époque et dont le bénéficiaire serait, entre autre, le futur président.

 

hajj200.jpgUne source au sein du Palais présidentiel a révélé à Newsleb-mania que « cet accord allait être révélé par le responsable des opérations pour l’armée libanaise au cours des combats de Nahr el-Bared, le général François el-Hajj ». « El-Hajj a été assassiné peu après avoir déclaré son intention de dévoiler ce secret », concède notre informateur. Et de conclure : « cela n’a choqué personne que ce général ait été assassiné à la voiture piégée dans une zone surprotégée comme celle de Baabda ». Ainsi, un lien très étroit existe non seulement entre le Fatah al-Islam et Michel Sleimane, mais aussi entre le groupe extrémiste et le clan Hariri.


Pourquoi la Bank Med ?


C’est en mai 2007, que Fatah al-Islam se fait officiellement connaître auprès de la population libanaise. Sa première cible est une filiale de la Bank Med, établissement bancaire détenu par la famille Hariri. A ce moment, peu de personne se pose la question suivante : pourquoi ces terroristes ont-ils visé la Bank Med ?


Pourtant, en mars de la même année, soit deux mois avant le déclenchement des heurts dans le camp de réfugiés palestiniens, le journaliste américain Seymour Hersh a affirmé dans un rapport que « pour défaire le Hezbollah, le gouvernement libanais a décidé de soutenir des groupes extrémistes sunnites ». Puis, lors d’une entrevue accordée en juin, à la CNN, l’enquêteur a révélé que ce groupe extrémiste sunnite s’avère être celui qui s’est battu à Nahr el-Bared. Selon lui, l’objectif du Fatah al-Islam était de récupérer ses dus. Une somme que leur devait Saad Hariri, deux ans après la mort de son père.

 

 


 

 

 

L’argument de M. Hersh est ainsi clair ; l’Arabie saoudite, d’un commun accord avec la Maison Blanche, soutient financièrement des groupes terroristes sunnites, à travers le clan Hariri, dans le but de faire face au Hezbollah, en cas de confrontation.


La thèse de ce financement a d’ailleurs été confirmée il y a quelques jours, par le quotidien Al-Akhbar. Dans le cadre de l’affaire des pèlerins libanais enlevés en Syrie, le journal indique que Saad Hariri aurait menacé l’opposition syrienne de ne plus la financer, si elle ne relâchait pas les fidèles.

 

A l’heure actuelle, tout porte à croire que la dissension au Liban prend de l’ampleur et que seule une volonté politique commune nationale et étrangère, pourrait empêcher un nouveau bain de sang au pays du Cèdre.

Publié dans Politique libanaise

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